Myriam Martin : pourquoi je n'ai pas voté le budget de la région

Le 26 mai dernier se tenait l'assemblée plénière du conseil régional Languedoc Roussillon Midi Pyrénées. Il s'agissait essentiellement de voter le budget primitif 2016.
Notre groupe Nouveau Monde En Commun a insuffisamment préparé collectivement cette séance sur le budget. J'y reviendrai car il ne s'agit nullement de constater une carence mais bien de constater une absence de volonté commune. Il ne s'agit pas bien sûr de nier notre diversité. Nous ne pouvons être d'accord sur tout. Mais chercher à construire une cohérence commune pour ce budget aurait du être notre priorité.
Ce budget présentait certains enjeux. D'abord c'est le premier de la mandature, et meme si on pouvait le présenter comme transitoire dans le cadre de cette fusion des régions qui est, en fait, en cours de réalisation, on était en mesure d'attendre des orientations répondant davantage aux exigences sociales, environnementales et d'égalité sur l'ensemble du territoire de la grande région. Ensuite c'était pour nous, le moment fort de montrer l'utilité de notre groupe. Enfin il s'agissait de mesurer notre capacité à peser sur les orientations du PS/PRG.
Nous avons raté le coche. Nous avions huit amendements à proposer, bien que la teneur de ces amendements avaient fait l'objet d'une discussion en réunion de groupe, la plupart, à tort, n'ont pas été présentés par l'ensemble du groupe. Deux faisaient débat entre nous, celui sur la gare de la Mogère et celui sur la LGV. C'est un désaccord entre nos camarades du PC et le reste de groupe. Je précise tout de meme que sur la Mogère nos camarades du PC ne sont pas favorables à cette gare mais ils estimaient que les garanties données par la présidente de région étaient suffisantes.
A part ces deux amendements, les autres n'auraient pas du poser de problèmes, ils concernaient la culture, l'agriculture, les lycées etc., avec la volonté de réorienter des budgets vers un ré-équilibrage pour les petits festivals, le spectacle vivant, vers l'agriculture biologique, vers les services publics (l'argent public au service public d'éducation, la gratuité des manuels scolaires et des premiers équipements pour les lycéens).
A part celui sur les lycées, je vais y revenir, les amendements ont été soutenus par des parties à géométrie variable du groupe. Pour ma part je me suis associée à l'ensemble des amendements car ils correspondaient exactement à ce qu'on avait exigé tous ensemble pendant notre campagne électorale.
Sur les lycées (voir mon intervention en fin de ce compte rendu), l'amendement présenté pourtant au nom de Nouveau Monde en Commun, n'a pas fait le plein des voix du groupe. J'attends avec impatience la réunion de bilan du groupe pour savoir enfin ce qui posait probléme dans cet amendement qui proposait de réorienter les subventions au privé (hormis les Maisons Familiales Rurales à la demande des verts ce à quoi j'ai souscrit sans problème) vers le public afin de financer les manuels scolaires et les bourses d'équipement des élèves en Midi Pyrénées, puisque sont reconduits pour l'instant les politiques antérieures et donc pour septembre 2016 la gratuité uniquement en Languedoc Roussillon.
Cette question de la gratuité a fait l'objet de débat et d'échanges entre le PS et moi même, avant l'assemblée plénière, sans pour autant que nous obtenions une position claire des socialsites ( au nom "d'une nécessaire concertation" avec les représentants des enseignants et des parents d'élèves, ou bien au nom de "problèmes techniques", ou bien au nom de "problèmes juridiques", la gratuté n'était pas possible). Cette valse hésitation peut faire craindre un retour en arrière sur la gratuité pour septembre 2017 au sein des deux anciennes régions. La vigilance s'impose dès à présent car c'est maintenant que les décisions vont etre prises en matière éducative.
Sur l'autre volet de l'amendement lycée, les subventions au privé, la réponse, après mon intervention, d'une vice présidente PS, m'a laissée sans voix! Cette élue, socialiste, a axé son intervention sur...la défense du privé! Pas un mot sur la défense du service public. Que dire si ce n'est que de nombreux socialistes ont abandonné la lutte pour un financement avant tout du service public. Devant cette capitulation qui montre en fait qu'au sein d'une grande partie du PS on considère les lycées privés payant faisant partie du service public (!), la droite s'engouffre bien sûr dans la brèche et affirme que la guerre scolaire est terminée! Comme si par le passé ce n'était pas la droite et les tenants du privé qui l'avaient toujours ravivée! Il n'est pas question de raviver quoique ce soit mais d'affirmer que la service public c'est un droit et c'est notre priorité. Le fait de ne pas comprendre ce qu'induit le service public, répondre à un besoin fondamental celui de s'éduquer, conduit à toutes les attaques auxquelles se sont livrées la droite et l'extreme droite : proposition de revenir sur tous les espaces de gratuité y compris dès septembre 2016 en Languedoc Roussillon. le FN, même calmé par l'avertissement énoncé en début de journée par la présidente de région, a quand meme proposé de revenir sur la subvention prenant en charge le pass contraception et les interventions sur l'éducation à la sexualité, trouvant que tout cela "est secondaire" et "qu'on ferait mieux de se servir de cette ligne budgétaire pour lutter contre la drogue dans les lycées"! Voilà comment le FN stigmatise notre jeunesse, dans la pure tradition réactionnaire et caricaturale, alliant la bêtise à la haine des jeunes.
Je souhaite revenir sur un des rares amendements présenté par le groupe en son entier, celui abordant les ressources propres aux régions et la nécessioté de refuser la baisse de dotation de la DGF (subvention de l'état en baisse constante, un manque à gagner cumulé de 206 millions d'euros depuis 2014). Comme la présidente de région et le groupe PS s'étaient déjà manifesté pour interpeller le gouvernement sur cette question car reconnaissant que cette baisse rend l'avenir incertain pour les finances de la région, comme de toutes les autres d'ailleurs, nous espérions un vote favorable à cet amendement ou du moins bienveillant. Il n'en a rien était puisqu'il a été repoussé. Carole Delga a alors indiqué qu'elle allait proposé une délibération sur ce sujet après le vote du budget. J'y reviendrai.
Le vote du budget
Avant de passer au vote lui même quelques précisions sur ce budget. Si nous avons proposé des amendements, même si ces derniers n'ont pas fait la plupart du temps l'unanimité du groupe, c'est qu'on estimait que ce budget présentait des limites : certaines ont été évoquées ci-dessus, d'autres auraient mérité d'être abordées en séance plénière, comme les subventions aux entreprises. Les aides doivent etre conditionnées au respect du droit social, des normes environnementales et de la non délocalistaion des emplois.
Pour autant le budget présentait des aspects positifs : augmentation de l'investissement par l'emprunt, des efforts en faveur de l'économie de proximité, aide à la restauration étendue à toute la grande région, harmonisation du régime indemnitaire pour tous les agents de la région catégorie C.
Des avancées réelles mais insuffisantes globalement, insuffisantes me concernant pour émettre un vote positif. N'oublions pas que ce budget se situe dans le cadre de l'austérité budgétaire imposée par le gouvernement aux collectivités territoriales. De plus des désaccords, connus existent. Je pense par exemple aux subventions allouées à la LGV. Peut être et sans doute faudra-t-il revenir sur cette question après les états généraux du rail, mais la position de Ensemble! est connue sur ce sujet : opposition à la LGV telle qu'elle est conçue aujourd'hui (coût excessivment élevé, mode de transport pour une certaine "clientèle", peu d'arrêts, destruction de terres arables etc.....). N'ayant pas voté ce chapitre transport ainsi que celui sur l'éducation entre autres, en toute cohérence, je me suis abstenue globalement sur le vote global du budget.
Le fait que le groupe Nouveau Monde en Commun ait éclaté son vote en trois parties est significatif d'un manque de cohérence de celui-ci. Mais surtout ces votes sont révélateurs de notre incapacité (ou de notre manque de volonté) à comprendre le rôle que nous pouvons jouer. En effet sans nous (26 membres dans le groupe) il n'y a pas de majorité à gauche. Nous avons là la possibilité d'exercer un certain rapport de force, afin d'être entendus sur un nombre non négligeables de sujets. Nous aurions pu ainsi rappeler collectivement que nous comptons, et que nous n'avons pas laissé au vestiaire ce que nous avons défendu lors de notre campagne. Ce n'est pas ce qu'il s'est passé. Nous pouvons et devons dans l'avenir faire mieux pour rester fidèles à ceux et celles qui nous ont fait confiance en décembre dernier.
Pour terminer ce compte rendu, revenons sur la fameuse délibération proposée par le PS et Carole Delga : cette délibération était censée interpeller le gouvernement, entre autres, sur la baisse de la dotation de l'état. En fait dès la première ligne il était impossible de voter ce texte : en effet il était tout simplment demandé "d'atténuer" cette baisse, c'est à dire d'aménager un peu l'austérité. Cette délibération a été repoussée car les membres de NMEC ont en gros voter contre ou se sont abstenus. Comme quoi il est parfois possible d'envoyer des avertissements aux dirigeant-es de la région.
L'assemblée des territoire un de derniers point à l'ordre du jour, nécessite un vrai débat entre nous et des éclaircissements quant au contenu et aux objectifs.
Le vrai sujet aujourd'hui c'est d'être utile, de maintenir des liens et d'en tisser de nouveaux à l'extérieur de l'institution avec le mouvement social qui doit à la fois nourrir notre réflexion, nos revendications et nous rappeler aussi que nous devons rendre des comptes.
Myriam Martin, le 31 mai 2016.
Mon Intervention sur les lycées (du 26 mai) :
"Avant de présenter mon amendement sur les lycées, je souhaiterais rassurer certains élus de droite sur le fait ou pas d'assumer ce qu'on défend en commission. Moi j'assume mes positions en commission comme devant tout le monde en assemblée plénière et je les défends jusqu'au bout. C'est une leçon que devrait suivre certains politiques qui oublient vite ce pour quoi ils ont été élus, peut être alors y aurait-il une fracture moins profonde entre le politique et la majorité de nos concitoyens dans ce pays.
Je sais que je ne m'adresse pas à tout le monde ici quand je parle de la défense et de la priorité aux services publics. Certaines positions sont empoisonnées aujourd'hui par le dogmatisme libéral d'ou sont bannies les idées d'égalité, de justice sociale, de solidarité. La défense des services publics est une tradition de la gauche sociale, syndicale, politique depuis le programme du Conseil Natinal de la Résistance jusqu'à la lutte altermondialiste pour sortir de la sphère marchande l'éducation, car le service public d'éducation appartient à ces biens communs qui répondent à des besoins fondamentaux comme celui de s'éduquer. On ne paie pas pour s'éduquer, le service public n'est pas un service payant. C'est ce qu'avaient compris de nombreux conseils régionaux dirigés par des socialistes, puisqu'à partir de 1998 dans la région Centre, à partir de 2004 dans le Limousin , en Franche Comté, en Bourgogne, etc... avait été mise en place la gratuité des manuels scolaires et des premiers équipements pour les lycéens. Qu'avaient ils mis en avant? La continuité du service public entre le collège et le lycée, et la justice sociale. Nous demandons la même chose aujourd'hui exactement pour les mêmes raisons. Cela serait un signal fort, un signal de gauche, envoyé aux élèves et à leurs familles dès la rentrée de septembre 2016 si la région commençait à harmoniser par le haut les mesures s'adressant aux lycéens."